Edito : Pour infliger une défaite au gouvernement Valls 2 et le chasser, pour mettre en échec le chantage à la dissolution et au retour UMP- d’une majorité UMP-Front National :
Mettre fin au dialogue social et imposer, par la mobilisation, une alternative politique
Le 16 septembre, trois semaines après la formation de son second gouvernement, Manuel Valls a demandé un vote de confiance au Parlement. Bien que cela ne soit pas une exigence constitutionnelle, Valls a jugé indispensable un tel vote pour pouvoir mener sa politique.
Et, ce jour là, Valls obtint donc l’appui demandé. Encore faut-il préciser. Depuis le printemps 2012, le gouvernement s’appuyait sur la majorité absolue que détenait à lui seul le Parti socialiste. Il avait aussi l’appui du PRG et des Verts et, à l’occasion, il pouvait compter sur le vote favorable du PCF comme ce fut le cas lors du vote de la loi réactionnaire contre l’école présentée par Peillon.
Lors du vote du 16 septembre, une fois encore, une majorité a certes voté la confiance ; 513 suffrages ont été exprimés, 269 députés votant pour, et 244 votant contre. Mais cette majorité de 12 députés n’existe que parce que l’on ne compte pas les abstentions. Or, 53 députés se sont abstenus, dont 31 députés du Parti socialiste et 17 écologistes.
La réalité, c’est donc que le gouvernement est minoritaire à l’Assemblée, alors qu’il est déjà ultra minoritaire dans le pays, et qu’une crise se développe au sein du PS.
Certes, dira-t-on, ces députés qualifiés de « frondeurs » ne sont qu’une minorité et n’ont même pas eu l’audace de voter contre. Mais il faut préciser que la soumission des députés du PS n’a été
obtenue, pour nombre d’entre eux, que sous la menace d’une dissolution de l’Assemblée par le Président. Le recours à cette menace ne renforce pas le gouvernement. Il nourrit la crise du PS et pose plus que jamais la question de la Constitution et des pouvoirs accordés au Président. Comprendre comment on en est arrivé à cette situation implique de revenir rapidement sur quelques récents développements.
S’appuyant sur cette majorité du PS, avec l’appui des députés d’Europe écologie-Les Verts, Hollande a installé un gouvernement qui a tourné le dos aux aspirations des salariés. Il a maintenu les lois réactionnaires antérieures, les a approfondies : la « réforme » des retraites et celle du code du travail, en 2013, ont poursuivi les contre-réformes antérieures ; la loi Fioraso à l’Université a préservé la loi Sarkozy-Pécresse ; la loi Peillon dans l’enseignement (votée avec l’appui du PCF) a accentué la dislocation de l’école publique, etc. Et le chômage a poursuivi son ascension.

Par le vote et surtout par l’abstention, les salariés ont donc lourdement condamné cette politique lors des élections municipales du printemps 2014, puis lors des européennes avec 56% d’abstention.
Prudemment, EE-les Verts choisirent de ne pas participer à ce gouvernement, lequel donna aussitôt de nouvelles satisfactions à la bourgeoisie.
Très vite, Valls s’est trouvé en difficulté. En juillet, les dirigeants des organisations syndicales (Solidaires, puis FO et CGT, et FSU) furent amenés à
boycotter la conférence sociale prévue pour préparer de nouvelles attaques contre les salariés. Certes, cela n’efface pas les deux années d’intense dialogue social qui ont permis à Hollande de faire passer sans entrave majeure sa politique. Et cela ne met pas fin à tout le dialogue social. Mais si les dirigeants syndicaux ont dû prendre cette décision, c’est parce que les salariés rejettent de plus
en plus la politique du gouvernement.
Et un nombre croissant d’élus du PS font aussi connaître leur opposition à cette politique.
La stagnation de l’économie perdurant, le patronat exige durant l’été qu’Hollande accélère les réformes. Le 20 août, Hollande annonce donc qu’il « veut accélérer les réformes ». Mais l’hostilité des salariés se réfracte dans le PS. Au gouvernement, Montebourg reprend à son compte, le 22 août, les propositions d’une partie des économistes bourgeois, qui demandent de combiner les mesures d’austérité avec un peu de relance. Trois jours après les déclarations de Montebourg, le gouvernement « démissionne » et Valls est chargé de former un second gouvernement.
Si Montebourg est débarqué, ce n’est pas tant pour le contenu de ses propositions que pour adresser un ultimatum à l’ensemble du PS et de ses élus : ils doivent se soumettre. Hamon et Filippetti sont donc également dégagés. Cela est conforme à la constitution antidémocratique de la Vè République : le Parlement est à la botte du Président, et il sera dissout s’il entend résister.
La coloration encore plus réactionnaire de ce gouvernement Valls 2 est exprimée par l’arrivée de Macron comme ministre de l’économie : ancien de chez Rothschild, cet individu souhaitait, il y a peu, que soit augmenté le temps de travail et généralisé le travail du dimanche.
Et, dès le 27 août, Valls se fait ovationner par les patrons, leur promettant une nouvelle salve de cadeaux, quitte à recourir pour cela à des ordonnances pour tordre le bras au Parlement.
Mais ce gouvernement n’a aucune légitimité. Il se dresse ouvertement contre ce qu’ont voulu les salariés aux élections de 2012. Et sa politique accentue les résistances au sein du PS... Certains élus rappellent désormais que la majorité parlementaire n’a pas été élue pour mener cette politique.
Face à cette résistance, la menace ultime de Hollande est de dissoudre
l’Assemblée Nationale. Cela signifierait l’arrivée immédiate d’une large
majorité UMP et Front national à l’Assemblée.
C’est ainsi que, le 16 septembre, le gouvernement de Valls a pu obtenir une majorité relative à l’Assemblée pour obtenir la confiance, sans pour autant gagner la majorité absolue.
Ce gouvernement est fragile. Le PS, qui constitue la majorité parlementaire, est en crise. Les députés du PS avec eux du PCF, sans même compter les écologistes, disposent encore d’une écrasante majorité au Parlement. Comment ne pas organiser la mobilisation pour imposer à cette majorité, par la manifestation et la grève, qu’elle satisfasse les revendications des salariés ?
D’ores et déjà, le Parlement doit voter le projet de programmation des finances publiques (incluant le contrôle du budget de la Sécurité sociale) et le projet de budget. Ces deux seuls projets impliquent mobilisation. Sans parler de tous les autres projets réactionnaires en préparation.
À partir de là, il est possible de formuler une alternative gouvernementale : ni gouvernement de Valls ni retour d’un gouvernement de l’UMP, avec ou sans l’appui du FN, mais combattre pour que cette majorité parlementaire désigne son propre gouvernement, un gouvernement qui satisfasse les revendications des salariés, des chômeurs et des retraités, et de la jeunesse touchée en particulier par
la précarité. Les députés ne le feront pas d’eux-mêmes, mais il est possible de le leur imposer.
Notons que certains font des phrases pour une VIè République... mais ne disent mot du combat immédiat pour imposer au Parlement qu’il rejette les exigences et les
prérogatives de l’Exécutif. Ce serait pourtant le premier acte concret par
lequel la Vè République pourrait être mise à bas.
De même, si l’on appelle à en finir avec cette politique, comment accepter que les
dirigeants syndicaux poursuivent un seul instant leur dialogue social permanent avec ce gouvernement ?
Car ce dialogue social est plus que jamais un rempart qui protège le gouvernement, entravant toute véritable mobilisation des travailleurs.
Le boycott du dialogue social est donc une exigence immédiate si l’on prétend
combattre cette politique et ce gouvernement.
Le 20 août dernier, Hollande rappelle encore : « Ma méthode, c’est la négociation (...) Laissons les partenaires sociaux avancer. S’ils aboutissent à un accord, il sera transposé dans la loi, comme nous l’avons fait pour le marché du travail et la formation professionnelle. Si ce n’est pas le cas, le gouvernement saisira le Parlement ».
Peut-on être plus clair ? Que les dirigeants syndicaux acceptent ou résistent, le Parlement recevra de Hollande l’ordre de voter... ce qu’exigent les patrons.
On voit bien là le rôle de ce dialogue social, qu’il faut combattre. Mais on mesure aussi combien il est nécessaire de combattre pour interdire à l’Assemblée qu’elle entérine la politique du gouvernement, et pour exiger d’elle qu’elle satisfasse les
revendications des salariés.