Édito : En défense des libertés démocratiques et des acquis sociaux
Sous couvert de lutte contre le terrorisme, le gouvernement français a donc décidé de renforcer le caractère policier de l’État : prolongation de l’état d’urgence, constitutionnalisation de celui-là, possibilité de déchéance de nationalité pour les binationaux, loi renforçant les pouvoirs de la police… cela dans le cadre de la Ve République, laquelle est l’une des constitutions les plus réactionnaires d’Europe. Il s’appuie pour cela sur un premier vote quasi-unanime, le 19 novembre 2015, à l’Assemblée nationale et sur le fait que les directions syndicales ont accepté de discuter, dans le cadre du comité de suivi, de l’application de l’état d’urgence.
Parallèlement, l’intervention de l’aviation française se poursuit en Syrie au nom de la lutte contre Daech. Mais les aviations française et américaine doivent se coordonner avec les armées de Poutine et d’Assad, lesquels écrasent sous les bombes le peuple syrien qui s’était soulevé en masse en 2011. Il y a, de fait, une complicité des impérialismes, dont la France, et des puissances régionales pour interdire aux Syriens d’en finir eux-mêmes avec la dictature et de décider de leur propre avenir.
Le gouvernement poursuit son offensive contre les travailleurs
Abrité derrière l’état d’urgence qui tend à paralyser les mobilisations, le 18 janvier 2016, devant le Conseil économique et social, Hollande a à nouveau claironné sa volonté d’amplifier la guerre menée contre les acquis fondamentaux des travailleurs et de la jeunesse. Des annonces qui « vont dans le bon sens », a déclaré P. Gattaz, responsable du MEDEF, tout en demandant qu’elles soient appliquées le plus vite possible. (Voir l’encart).
Le combat pour la levée de l’état d’urgence et ceux en défense des acquis ouvriers sont des combats complémentaires. Défendre tous les droits démocratiques est une nécessité pour les travailleurs qui veulent défendre leurs acquis.
Radicalisation des bourgeoisies d’Europe face à la crise
Cette radicalisation n’est pas propre à la France. En Hongrie, les réformes constitutionnelles ont donné au régime hongrois le caractère d’un État fort.
En Pologne, le retour au pouvoir du parti populiste Droit et Justice (PiS) se traduit par des réformes brutales visant à donner tous les pouvoirs à l’exécutif…
Dans le même temps, des régimes réputés démocratiques, multiplient les lois contre les réfugiés et les immigrés. Ainsi, au Danemark, le gouvernement minoritaire ne tient-il qu’avec l’appui du très réactionnaire Parti populaire qui veut spolier les réfugiés de leurs objets de valeur.
Ce renforcement du caractère autoritaire de certains régimes, la multiplication des mesures contre les réfugiés, s’inscrivent dans un cadre général : la radicalisation d’une fraction des bourgeoisies européennes, la fraction la plus menacée par la crise (tandis que leurs couches dominantes poussent au libre-échange). La progression du Front national participe de ce processus. Par contre, toutes ces fractions sont unies pour faire payer la crise par les salariés, attaquer leurs acquis fondamentaux.
Un tel processus de radicalisation n’a rien d’étonnant en période de crise. Le problème est qu’il n’a pas d’équivalent organisé du côté des exploités, dont les partis traditionnels, favorables (ou non) à l’ouverture des frontières, respectent tous le capitalisme.
Des militants ont donc espéré des partis nouveaux, des formes nouvelles d’organisation. Il y a eu le mouvement anti-parti du 15M espagnol, auquel a succédé le parti PODEMOS. Il y a eu SIRYZA.
Mais force est de constater que la question centrale, au delà des formes organisations, est celle du programme. C’est sur ces questions que SYRIZA s’est mis lui-même en opposition à ses promesses. Ces sur ces questions que PODEMOS a limité lui même son développement en tournant, par exemple, le dos à la mobilisation en défense du droit à l’avortement.
Pour les revendications « ouvrières », contre des revendications frelatées
Les revendications mises en avant dans les combats de la classe ouvrière et de la jeunesse visent d’abord à préserver les acquis antérieurs. Aujourd’hui, le capitalisme, qui est sous la menace d’une crise majeure, préserve ses profits en menant un combat incessant contre les travailleurs. Tous les acquis sociaux, économiques arrachés antérieurement sont menacés, et le capitalisme ne laisse comme avenir à l’immense majorité de la jeunesse que la précarité ou le chômage.
Le combat pour les véritables revendications est d’autant plus indispensable que les dirigeants des organisations ouvrières non seulement édulcorent les revendications, mais mettent en avant des « revendications » qui sont celles de la bourgeoisie. Cela sous couvert de « bonne gestion » ou de « meilleure » gestion du capitalisme, voire d’une gestion « anti-libérale ». La « sécurité sociale professionnelle », le CPA en sont un bel exemple (1).
Construire un nouveau parti : sur quelle orientation ? Sur quel programme ?
La simple défense des acquis amène la jeunesse et les salariés à s’affronter ouvertement aux gouvernements bourgeois.
Dans certaines situations, les salariés essayent d’utiliser les vieilles organisations d’origine ouvrière, aussi dégénérées soient elles, pour répondre à la question du pouvoir. Mais les gouvernements qui en résultent, comme en France, mènent eux aussi une politique de défense du système capitaliste ; Cela vaut y compris quand un Parti communiste, comme au Portugal par exemple, soutient « de l’extérieur » un gouvernement dirigé par le Parti socialiste.
La nécessité de construire un nouveau parti défendant les intérêts des travailleurs devient donc une exigence de plus en plus forte. Mais pour quelle politique ? Sur quel programme ?
L’exemple de Syriza montre que la « nouveauté » (toute relative d’ailleurs) n’est pas, en soi, une garantie. Mais il ne suffit pas non plus d’accumuler un catalogue de revendications « radicales ».
La construction d’un nouveau parti, d’un Parti ouvrier révolutionnaire implique d’autres conditions, et en particulier celle-ci : le combat sur tous les plans, à chaque instant, pour l’indépendance (financière et politique) de la classe ouvrière et de ses organisations vis-à-vis de la bourgeoise, de l’État et des innombrables instance de « dialogue » social, de « participation », de « cogestion ».
(1) cf. le dossier du n° 24 de L’insurgé http://insurge.fr/AC_bulletin_num024.html )