Le patronat l’avait exigé, Macron s’exécute
15 avril 2020
Communiqué de L’insurgé
Dans son allocution du 13 avril, le Président a annoncé que le confinement prendrait fin progressivement à partir du 11 mai et indiqué quelques mesures complétant cette décision. Tout le reste ne fut qu’un mauvais et sirupeux monologue théâtral. Aussitôt, le patronat s’est félicité. « Nous sommes satisfaits que le Président ait fixé un cap pour remettre le pays en marche » a déclaré le Medef.
Rétablir la production pour rétablir les profits
Les grands patrons réclamaient la fin du confinement… pour les entreprises. Celui de Michelin, Florent Menegaud, indiquait le 2 avril : « le confinement n’est qu’une solution transitoire. Nous le disons au gouvernement : il ne peut pas être éternel ». Puis le 10 avril : « Le confinement était indispensable pour contenir l’épidémie et faire prendre conscience à la population de la gravité de la situation. Mais ce n’est pas la vie normale. Le confinement doit prendre fin dans quelques semaines ».
Le président du Medef Geoffroy Roux de Bézieux enfonçait le clou le 11 avril : « L’important, c’est de remettre la machine économique en marche et de reproduire de la richesse en masse, pour tenter d’effacer, dès 2021, les pertes de croissance de 2020 ».
« C’est la création de richesses qui permettra (...) de rembourser la dette accumulée pendant la crise », ajoutait-il. Et surtout de rétablir les profits. Mais ça, il oubliait de le préciser.
Et les approximatives mesures sanitaires soi-disant adoptées par les entreprises ne visent qu’à surmonter les inquiétudes et les résistances des salariés.
Comme le patronat le demandait, Macron a donc annoncé une levée progressive du confinement à partir du 11 mai. Pourquoi pas avant ? Tout simplement parce qu’il n’y a toujours pas de masques en nombre suffisant, et que les hôpitaux sont toujours submergés. Mais Macron prétend qu’à partir du 11 mai, « chaque Français » devrait pouvoir se procurer un « masque grand public ».
Réouverture des écoles… pour les besoins de l’économie
Mesure complémentaire : la réouverture progressive des crèches, écoles et lycées (mais pas des universités) à partir du 11 mai, qualifiée de « priorité » par Macron car « la situation actuelle creuse les inégalités, notamment dans les quartiers populaires et dans nos campagnes ».
Mais si telle était la vraie raison, pourquoi donc le ministre Blanquer précise-t-il le lendemain que cette reprise serait facultative pour les élèves ? En réalité, même Olivier Faure, le premier secrétaire du Parti socialiste, l’a compris : le « but inavoué », c’est de « renvoyer travailler les parents », en précisant « Les étudiants se gardant tous seuls ». Ce sera l’école garderie (obligatoire pour les enseignants) et non la même école pour tous.
« C’est tout sauf sérieux » explique, avec lucidité, la responsable du SNUipp, premier syndicat du primaire. « Il va y avoir une forte incompréhension de la part des enseignants, on a l’impression d’être sacrifiés sur l’autel de l’économie ».
Car c’est une évidence : une telle réouverture pour les besoins de l’économie serait criminelle vu la pénurie de masques, tests, médicaments... Rappelons que la décision de fermeture des écoles, le 12 mars, précède la décision du confinement ; que le premier mort en France est un enseignant de l’Oise ; et que dans ce département où l’épidémie a débuté, beaucoup d’enseignants sont tombés malades du Covid-19 et beaucoup d’enfants testés étaient eux positifs.
Mais c’est par le dialogue social que Blanquer veut faire avaliser ses projets de ré-ouverture des classes : il ne cesse d’expliquer que les décisions seront prises en concertation avec les organisations syndicales, pour définir des pseudo-règles sanitaires.
Or ce n’est ni au gouvernement ni aux employeurs de décider à la place des personnels, des salariés : c’est aux travailleurs de s’organiser pour décider des conditions sanitaires de reprise sur les lieux de travail et de les imposer (conditions matérielles, horaires et temps de travail, salaire).
« Il faudra travailler plus »
Le patron du Medef l’avait déclaré le 12 avril : « Il faudra bien se poser tôt ou tard la question du temps de travail, des jours fériés et des congés payés pour accompagner la reprise économique et faciliter, en travaillant un peu plus, la création de croissance supplémentaire ».
La secrétaire d’État Agnès Pannier-Runacher lui fait aussitôt écho en affirmant le même jour qu’« il faudra probablement travailler plus que nous ne l’avons fait avant ».
Puis, face au tollé, il dut faire marche arrière. En apparence. Augmenter le temps de travail « ne peut se faire que dans le dialogue social avec les syndicats, par entreprise : j’ai lu leur réponse, donc le débat est clos d’une certaine manière, puisqu’ils ont tous répondu plus ou moins fortement qu’il n’en était pas question ». Mais le patronat ne renoncera pas, comptant justement sur ce dialogue social pour arriver à cet objectif, comme le montre l’accord signé à PSA avec 4 organisations syndicales.
Macron, quant à lui, évite la difficulté (« Je reviendrai vers vous pour parler de cet après ») et agite une formule apparue en 1944 : « Mes chers compatriotes, nous aurons des jours meilleurs et nous retrouverons les Jours Heureux ».
Des « jours heureux » ? Avec Macron ? En conservant le capitalisme ? Cette formule mythique est alors absurde.
La bourgeoisie est totalement responsable : c’est à elle de payer l’ardoise
Nombre d’experts scientifiques avaient alerté sur le fait qu’inévitablement une nouvelle épidémie de coronavirus aurait lieu tôt ou tard. Ce fut le Covid-19. Mais rien n’avait été préparé pour la contenir puis la maîtriser. Bien au contraire. Ainsi, les immenses stocks de masques n’ont pas été renouvelés, et ont été éliminés pour faire de misérables économies. Pour améliorer leurs profits, les laboratoires pharmaceutiques avaient massivement délocalisé en Chine la fabrication des produits qui leur sont indispensables. Plus de 80 % des principes actifs.
Les demandes faites par des chercheurs pour étudier de manière approfondie les coronavirus n’ont pas été satisfaites, le gouvernement et l’UE se sont désengagés de ces recherches à partir de 2009.
Et les hôpitaux ont été asphyxiés, de manière planifiée, par des années d’austérité. À ce jour encore, les vagues promesses pour l’hôpital ne se sont pas concrétisées tandis que les milliards coulent à flot pour les patrons.
C’est pour ces raisons que l’épidémie n’est toujours pas maîtrisée et qu’un confinement insupportable est imposé à la population au mépris du droit démocratique élémentaire à la libre circulation : c’est la recherche du profit, les politiques d’austérité, qui sont responsables du fait que le seul qui ait encore le droit de circuler, c’est le Covid-19, tuant des dizaines de milliers de personnes.
Toutes les pertes financières, c’est à la bourgeoisie de payer. L’indemnisation pour les malades et les familles des victimes ? C’est à elle de payer.
Le préjudice immense imposé aux dizaines de millions de personne contraintes à un insupportable confinement ? C’est à elle de payer. À elle et à son gouvernement.
Elle ne le pourrait pas ? Alors qu’elle laisse le pouvoir, avec les banques et les entreprises, aux travailleurs.
Et comme elle ne le fera pas d’elle-même, il faudra bien le lui imposer.
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