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Macron poursuit la guerre contre l’Enseignement public
Alors que la cinquième année du quinquennat de Macron est bien entamée, le gouvernement maintient le cap politique et applique le programme présidentiel jusqu’au bout. En dépit des bouleversements de l’Enseignement public mis en œuvre, Blanquer a pu tenir et continue d’appliquer ses réformes. Il s’appuie sur la crise sanitaire, sur la collaboration des organisations du mouvement ouvrier pour aller toujours plus loin.
Alors que les cadres de transformation profonde de la structure de l’école et du lycée sont mis en place, la politique du gouvernement continue de rencontrer de nombreuses résistances sur le terrain. L’objectif de Macron est maintenant de lever ces derniers obstacles et de faire sauter le verrou des statuts en s’appuyant sur la casse orchestrée de l’Enseignement public.
Une transformation radicale du système éducatif est enclenchée
L’institut Montaigne indique dans un rapport sur la politique menée par le gouvernement qu’il a réussi à faire ce qui paraissait inimaginable quelques années plus tôt : casser le baccalauréat comme diplôme national, garant du maintien d’un cadre national de l’éducation.
L’objectif du gouvernement reste le même : former à moindre coût une main d’œuvre servile au niveau de qualification adapté aux besoins du patronat. Cela passe par la réduction des droits collectifs, pour en finir avec une société de statuts comme annoncé par Macron.
Même si quelques épreuves restent organisées nationalement, le bac prend un caractère local très marqué, accroissant les inégalités et la concurrence entre les établissements. Le diplôme même du baccalauréat prend alors une valeur différenciée, qui sera diversement prise en compte pour les possibilités de poursuite d’étude offertes aux futurs étudiants. La reconnaissance du diplôme dans les grilles de convention collective est elle aussi menacée à terme.
La réforme du lycée a institué une multiplicité de parcours. Deux élèves d’un même établissement, faisant le même choix d’enseignement ne seront pas évalués de la même façon pour le baccalauréat, ce qui est l’objectif même du contrôle continu. Ainsi, ces attaques sont cohérentes avec les intentions affichées de Macron d’en finir avec une « société de statut », avec le développement des certifications tout au long du parcours de la personne : élèves-étudiants-salariés. La charge de développer et d’entretenir son employabilité incombera aux jeunes, qui devront passer un nombre de certifications au cours de leur scolarité, certifications à durée limitée.
Le gouvernement a ainsi enclenché un pilotage par les résultats des établissements, qui s’appuiera sur des évaluations nationales. Celles-ci se mettent peu à peu en place, dès la maternelle pour les enfants de 3 ans, et sont vouées à se multiplier. Ce sera la base sur lequel le gouvernement compte d’appuyer pour évaluer les établissements, les équipes pédagogiques et chaque enseignant.
Des premiers jalons posés dès cette rentrée
La rentrée 2021 est marquée par l’augmentation de la part du contrôle continu au baccalauréat, minorant son caractère national. Cela s’accompagne de la mise en place de projets locaux d’évaluation (PLE) qui doivent définir les pratiques évaluatives des enseignants au sein d’un établissement. Ces projets sont une première étape vers la mise au pas des enseignants et la limitation de leur liberté pédagogique. Sous couvert d’assurer une égalité de traitement entre les élèves d’un établissement (égalité mise en cause par le principe même du contrôle continu), il s’agit de permettre aux chefs d’établissements et aux inspecteurs de s’immiscer dans le travail enseignant, d’imposer peu à peu leurs prérogatives alors qu’ils n’avaient pas leur mot à dire sur la manière dont les enseignants organisaient leur travail avec les élèves.
Autre nouveauté, la fonction de professeur référent est créée (et faiblement indemnisée) pour prendre en charge une partie du travail autrefois effectué par les professeurs principaux. C’est surtout un moyen pour les directions d’établissement de différencier le traitement des enseignants et de diviser les collègues.
Sous couvert d’assurer la continuité pédagogique dans les établissements, le gouvernement organise à la rentrée le remplacement des enseignants par des surveillants sur de courtes durées, et il promeut l’utilisation du numérique et de l’enseignement hybride, en lieu et place d’enseignants recrutés.
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Le gouvernement ne compte pas s’arrêter là : de nouvelles attaques sont à l’ordre du jour. C’est tout l’objet du Grenelle de l’éducation dont le but n’est en rien d’augmenter le salaire des enseignants et des fonctionnaires comme le laissent croire les directions syndicales mais au contraire de transformer l’organisation des écoles, collèges et lycées ainsi que le statut et la gestion des enseignants en lien avec les réformes de structures de l’éducation.
Vers plus d’autonomie pour les établissements
Blanquer a annoncé vouloir développer l’autonomie des établissements, contre le cadre national de l’éducation. Différentes mesures, comme les contrats locaux d’objectifs, les projets locaux d’évaluation, le contrôle continu du baccalauréat déjà mises en place posent les premières pierres de ce que serait une gestion délocalisée de l’éducation, où les attendus varieraient d’un établissement à l’autre. Pour surmonter les résistances des personnels, le gouvernement envisage plusieurs leviers.
Ainsi, Blanquer a annoncé la création d’un emploi fonctionnel pour les directions d’écoles, première étape vers un pouvoir hiérarchique, ce que va mettre en place la loi Rilhac.
Dans le second degré, les chefs d’établissements sont désormais les supérieurs hiérarchiques directs des adjoints.
Suite au Grenelle de l’éducation, le ministre Blanquer a annoncé « 12 propositions » : il prévoit d’aller plus loin encore avec l’établissement de multiples coordinateurs autour des chefs d’établissement, permettant de diviser les collègues et d’étendre le contrôle des chefs.
Lever le verrou des statuts
Le gouvernement entend développer une gestion des ressources humaines de proximité GRH de proximité. Par ce biais, il entend contrôler plus étroitement le travail des enseignants, mais aussi personnaliser les carrières, individualiser les salaires.
Dans le premier degré, Macron a annoncé l’expérimentation du recrutement des enseignants par les directeurs d’école. Dans le second degré, les postes à profil sont de plus en plus nombreux. Après la suppression du contrôle exercé par les commissions paritaires, le gouvernement s’engage vers la voie du recrutement local des enseignants : Blanquer a ainsi annoncé une dés-anonymisation du dossier des enseignants lors des mutations.
Individualiser les parcours
Les dernières déclarations de A. de Montchalin, ministre de la Transformation et de la Fonction Publiques et de J. M. Blanquer vont dans le même sens. Il s’agit de « repenser le système de rémunération et de carrière », d’en finir définitivement avec une augmentation générale des salaires par le point d’indice tout en remettant en cause l’avancement à l’ancienneté.
Dans le même temps, le gouvernement s’engage dans une dernière étape de mise en œuvre de la loi de Transformation de la Fonction publique (TFP). Avec la création d’un Code de la Fonction publique, il s’agit de s’attaquer au statut général des fonctionnaires. Cette codification ferait éclater les quatre lois (1946, 1983, 1984, 1986) qui fondent le statut général et les dispositions statutaires relatives, respectivement, à la fonction publique de l’État, à la fonction publique territoriale et à la fonction publique hospitalière en 8 livres. Ce code est conçu comme une boite à outil pour les DRH constituée de différentes entrées par thème mêlant les règles des personnels des trois fonctions publiques, celles des personnels statutaires et des contractuels… On annule ainsi toute la logique du statut au profit d’une vision managériale et on facilite grandement les possibilités de détruire les acquis statutaires.
Ces changements vont à l’encontre des garanties statutaires attachées au grade et préparent le terrain à une fonction publique d’emploi, avec une gestion commune des personnels quel que soit leur statut, titulaires, contractuel, vacataire, etc. Loin d’assurer de la visibilité aux personnels précaires, cela conduira à pérenniser leur situation tout en diminuant les droits des titulaires.
Défendre les acquis statutaires : rompre avec le gouvernement
Les directions syndicales ont une responsabilité majeure dans le fait que le gouvernement puisse avancer sans encombre. Dans l’Enseignement, elles concentrent leur critique sur le faible montant de la revalorisation annoncée. L’enveloppe de 400 millions d’euros est effectivement dérisoire, rapportée au million de personnels de l’Éducation nationale. Et le blocage du point d’indice est maintenu. Mais, la participation des organisations syndicales à l’Agenda social du Grenelle de l’éducation a cautionné le développement de primes et d’indemnités à géométrie variable, l’individualisation des rémunérations et de nouvelles attaques contre les statuts et les obligations de service.
De même, dans la Fonction publique, alors que le gouvernement refuse toute augmentation générale des salaires par la revalorisation du point d’indice et l’amélioration de la grille indiciaire, ne concédant que quelques « revalorisations ciblées », les fédérations de fonctionnaires acceptent de participer à la conférence salariale ouverte le 21 septembre par A. de Montchalin et qui devrait durer jusqu’en février 2022. Pour le gouvernement, il s’agit d’amener les syndicats à se situer sur le terrain qu’il a clairement indiqué : « redéfinir le système des carrières et des rémunérations ». Le gouvernement entend publier rapidement son Code de la Fonction publique (une ordonnance sera soumise au gouvernement le 24 novembre prochain). Les attaques contre les garanties statuaires en seront d’autant facilitées. Poursuivre ces concertations, c’est donner tout le crédit des organisations syndicales nécessaire au gouvernement pour poursuivre sa politique pourtant massivement rejetée
La défense du statut des fonctionnaires, du personnel enseignant implique plus que jamais de combattre pour imposer aux directions syndicales de rompre avec ces concertations et de réaliser l’unité en défense des revendications, à commencer par l’exigence du retrait du projet de code de la Fonction publique.
Loi Rilhac : une attaque sans précédent contre l’école et le statut des enseignants
La loi Rilhac, c’est « l’école du futur » de Macron : des directeurs-DRH recrutant le personnel d’une école territorialisée, avec une organisation, des programmes variables selon les villes, les quartiers, l’origine sociale des élèves… Elle met fin à la gestion collective de l’école par le conseil des maîtres et annonce une école soumise aux besoins du patronat. Depuis 20 ans, les enseignants du premier degré ont fait échouer les tentatives de faire des directeurs d’école de vrais chefs d’établissement. JM Blanquer avait dû reculer à deux reprises (lors de la loi Blanquer et en juin 2020 lors de l’adoption de la proposition de loi Rilhac en 1re lecture à l’Assemblée). Mais au lieu d’organiser la mobilisation pour le retrait du projet de loi, durant un an, dans le cadre des concertations du Grenelle, les directions syndicales se sont soumises à l’Agenda social de Blanquer, siégeant dans les « groupes de travail » qui tous étaient conçus selon les objectifs du ministre.