SOUTIEN INCONDITIONNEL AUX REVENDICATIONS DES PERSONNELS HOSPITALIERS
Ces revendications ne seront pas satisfaites par le « Ségur de la santé » !
Le gouvernement est inquiet. Durant toute l’année 2019, il a refusé de prendre en compte les revendications des personnels hospitaliers, mais aujourd’hui, il ne peut plus – après trois mois de crise sanitaire – continuer à ignorer ces revendications, car toute la population mesure les conséquences catastrophiques de la politique d’austérité qui a frappé l’hôpital public : les fermetures de lits et les suppressions de postes se conjuguent avec le manque de moyens matériels, les salaires de misère et la surcharge de travail deviennent insupportables, et même de simples masques ont fait défaut des mois durant.
Cette politique d’austérité mise en œuvre par les gouvernements successifs (Sarkozy puis Hollande notamment) a été poursuivie par Macron et a touché toute la santé publique, y compris la Recherche (non financement, par exemple, des recherches entamées sur les coronavirus).
C’est contre cette politique que les personnels hospitaliers se sont organisés et mobilisés depuis le printemps 2019, constituant des collectifs (dont celui des urgences) et appuyés par leurs syndicats pour revendiquer des salaires, des postes, des ouvertures de lits.
Durant le pic de l’épidémie, les personnels hospitaliers ont consacré toutes leurs forces au soin des malades, mais désormais, ils réaffirment leurs revendications, avec le soutien de toute la population. Et, depuis deux semaines, recommencent à manifester, à se rassembler devant les hôpitaux.
Le gouvernement, dont le bilan est désastreux, s’inquiète. Il a d’abord tenté de calmer la colère par quelques vagues promesses et quelques miettes pour diviser les personnels : des primes dont le montant est variable selon les services et hôpitaux. Puis il s’est imaginé d’offrir une médaille aux personnels et de les associer aux cérémonies du 14 juillet ! Une véritable provocation.
Macron lui-même a pu mesurer la colère que suscite sa politique lors d’une visite à l’hôpital de la Pitié Salpêtrière le 15 mai. « On veut du flouze, du pèze, de la fraîche » lui lance une infirmière.
Et le gouvernement redoute que la mobilisation en défense de l’hôpital et de ses personnels devienne la pointe avancée du combat contre toute sa politique. Alors, il manœuvre.
Il propose un nouveau plan pour l’hôpital, préparé par des discussions organisées au ministère de la Santé, avenue du Maréchal de Ségur, sous la houlette de Nicole Notat : un « Ségur de la Santé ».
Le « Ségur de la Santé » : un nouveau chapitre réactionnaire ?
C’est donc un nouveau chapitre qui s’ouvre avec Nicole Notat. Olivier Véran, ministre de la Santé, a déjà indiqué que seraient remises en question les 35 heures. Autrement dit : travailler encore plus pour avoir quelques miettes. Cette concertation qui commence le 25 mai doit permettre, pour Véran, de « bousculer les conservatismes ». On ne peut donc que s’inquiéter quand on connait l’hostilité de Macron aux statuts (notamment ceux des fonctionnaires), d’autant plus que le 15 mai, Olivier Véran a fait mine de s’interroger sur le maintien du « cadre unique de la fonction publique ».
Quant à Martin Hirsch, le directeur général de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris qui – depuis 2013 – a mis en œuvre avec zèle la politique d’austérité, il est très clair : « il faut libérer l’hôpital public de ses carcans », en précisant par exemple : « Il n’est pas écrit dans la Constitution que l’existence d’une fonction publique hospitalière implique une égalité de rémunération entre toutes le disciplines médicales. »… Or cela revient à casser ce statut de fonctionnaire.
Et le choix de Nicole Notat laisse redouter le pire. Cette ancienne dirigeante de la CFDT, devenue célèbre pour le soutien qu’elle apportait aux attaques… contre les salariés (notamment le plan Juppé de 1995), fut aussi un ferme soutien de Macron en 2017.
Macron cherche à gagner du temps
À quoi va servir cette concertation ? S’il s’agissait de satisfaire les revendications des personnels, qui sont connues de longue date, une heure suffirait pour en faire le tour et les satisfaire. Mais l’objectif est autre : le gouvernement n’a renoncé ni à s’attaquer au statut des personnels, ni à rapprocher le public du privé, ni à satisfaire les laboratoires pharmaceutiques, ni à faire gérer chaque hôpital comme une entreprise et pas plus à poursuivre l’asphyxie de la Recherche. Il veut aussi gagner du temps : car, le 22 mai, il a annoncé que le second tour des élections municipales aurait lieu fin juin. Et – ce n’est pas un hasard – ce n’est qu’en juillet (« au plus tard mi juillet ») que le gouvernement tirerait les conclusions de ce que certains appellent, à tort, des négociations (une négociation n’a pas besoin d’intermédiaire, comme Notat. Une négociation, c’est directement l’État-patron face aux représentants des salariés).
La conclusion s’impose : c’est immédiatement que doivent être satisfaites les exigences des personnels, la première étant la hausse massive des salaires (et du point d’indice) sans contre-partie.
Ni « médailles » ni « défilé » mais des « revalorisations de salaires »
Les personnels hospitaliers n’entendent pas se laisser berner. Jeudi 20 mai, devant l’hôpital Robert Debré à Paris, des dizaines de soignants ont, une nouvelle fois, manifesté pour réclamer des « lits » et « du fric pour l’hôpital public ». Ils ont été rejoints par des centaines de manifestants venus leur apporter leur soutien en chantant : « on est là, même si Macron ne veut pas, on est là ». Au micro, un infirmier du collectif Inter-Urgences précise que les personnels ne veulent « pas de médailles » ou de « défilé » mais des « augmentations de salaires ». Déjà, le 14 mai, ils avaient affirmé « leurs médailles, on n’en a que faire ! ».
« Revalorisations des salaires » et « réouvertures de lits » sont également demandées par le collectif « Le printemps de la psychiatrie ». Et les personnels d’autres hôpitaux (par exemple l’hôpital Tenon à Paris) s’engagent aussi dans ces manifestations « #jediscolère » : exigences qui se dressent contre une politique « managériale » et une bureaucratie pléthorique dont l’objectif est la rentabilité et non la qualité des soins.
Défendre la Santé publique contre la conférence Ségur-Notat-Macron
L’hôpital est au cœur du système de la santé publique, sa défense est essentielle. D’autres revendications doivent être défendues, à commencer par celles des personnels des Ehpad. (Sur ce plan, le projet gouvernemental de créer une cinquième « branche » pour la Sécurité sociale chargée des personnes dites « dépendantes » n’est qu’un moyen de prélever un nouvel impôt).
Doivent aussi être réaffirmés la liberté de prescription des médecins, le fait qu’ils n’ont pas à « tracer » la population, et la possibilité pour les chercheurs de poursuivre (ou reprendre) leurs travaux sans entrave financière.
D’autres revendications doivent être mises en avant, comme l’expropriation des trusts pharmaceutiques (sans indemnisation des actionnaires). Mais aucune ne peut être satisfaite par le dialogue social ou par une quelconque « concertation ». Les revendications des personnels ne sont pas négociables, ne doivent pas faire l’objet de contre – parties. Rejeter un tel dialogue social est une nécessité pour préserver l’unité des personnels, des coordinations, des syndicats dans leur combat.