Solidarité avec Kobané et avec Alep !
On ne peut dissocier le combat mené contre Da’ech du combat mené contre le régime de Bachar al-Assad
Depuis l’été 2012, à Alep, la population et les forces de la résistance syrienne, en particulier celles qui se réclament de l’ASL, tiennent tête à l’offensive des troupes de Bachar al-Assad dans des conditions épouvantables : depuis des mois, chaque jour, l’aviation syrienne lance des barils de TNT sur les habitations, les écoles et les hôpitaux, comme elle le fait sur d’autres villes. Hier, c’est sur un camp de réfugiés que de tels barils ont été jetés. Sur la ville de Douma, proche de Damas, l’aviation utilise des bombes à fragmentation. Et on estime que plusieurs centaines de bombardements ont été opérés par l’aviation de Bachar-al Assad la semaine écoulée.
Mais les medias sont en général très discrets sur ces bombardements.
Et, tandis que quelques avions américains survolent la Syrie pour lancer quelques bombes contre Da’ech, l’aviation syrienne a quartier libre pour terroriser la population et écraser les insurgés. Et cela d’autant plus que l’OTAN et les états-Unis ont empêché que des armes de défense antiaérienne arrivent jusqu’aux insurgés syriens.
Elle a demandé des armes pour se défendre. Cela lui fut refusé. Les gouvernements américains, français, anglais et allemand ont préféré préserver le régime syrien plut ôt que de voir victorieuse cette révolution. Quant à l’impérialisme russe, il soutient ouvertement la dictature syrienne. Son ministre des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, a annoncé de nouvelles et « importantes livraisons d’armes et de matériel militaire » à Damas (RIA Novosti le 20 octobre).
C’est dans ces conditions qu’a pu proliférer Da’ech, forces ultra réactionnaire constituée avec l’aide du régime d’al-Assad puis encouragée par des « aides » venues de Turquie et des monarchies de la région. Le r ôle de Da’ech est de poignarder dans le dos la révolution syrienne. Ce n’est que lorsque la progression de Da’ech en Irak a menacé les intérêts des états-Unis que ceux-ci sont intervenus militairement. Et qu’ils ont dû apporter une aide (chichement mesurée) aux forces kurdes de Syrie et d’Irak qui résistaient à l’offensive de Da’ech. Mais ils refusent d’aider les Syriens qui, comme à Alep, ont expulsé Da’ech de leur ville.
Pourtant, en Syrie, l’alliance entre les forces de la résistance syrienne et celles des régions kurdes est manifeste. Les accords passés entre ces forces sont publics et, à Kobané même, aux c ôtés des Kurdes syriens combattent plusieurs centaines d’Arabes syriens se revendiquant de l’ASL.
Dans ces conditions, si la solidarité avec Kobané est une impérieuse nécessité, la solidarité avec Alep, avec l’ensemble de la révolution syrienne est tout autant indispensable. Pourquoi donc alors certains n’affirment de solidarité qu’avec la résistance « kurde » de Kobané, oubliant les non- Kurdes de Kobané, oubliant Alep et tant d’autres villes martyrisées ?
L’extrême droite française tient le même discours. Robert Ménard, qui revient de Damas, explique que le régime syrien est « certes critiquable, mais qu’il est le seul à pouvoir faire barrage à Daesh (l’état islamique) ». De la part d’un maire lié au FN, cela n’étonne pas.
Quant au le PCF, qui refuse tout soutien à la révolution syrienne, il prône depuis 2011 le dialogue avec Bachar al-Assad. Aujourd’hui, il se proclame solidaire des Kurdes contre Da’ech. Dans un tract titré « Urgence Kobané », il appelle à « livrer des armes à la résistance kurde de Kobané » (mais non aux autres Syriens) « pour résister à l’EI » ...mais non pour combattre Bachar al-Assad. Au contraire, il propose « l’ouverture de négociations politiques entre le gouvernement syrien et une opposition démocratique rassemblée » , ce qui revient à légitimer le régime syrien. Comme Poutine, le PCF tente ainsi de séparer le combat des Kurdes du combat contre Assad. Sur ce plan (comme sur d’autres) la position du PCF ne fait pas l’unanimité au sein du Front de gauche.
Précisons que soutenir le combat du peuple kurde ne signifie pas soutenir les organisations kurdes elles mêmes et leur politique, qu’il n’y a pas lieu d’idéaliser comme certains le font parfois (cela vaut en particulier pour le PYD - Parti de l’union démocratique, en Syrie - et sa maison mère en Turquie, le PKK, ainsi que pour le parti de Barzani en Irak). Mais le soutien au combat des Kurdes et Arabes à Kobané est une question de principe : un succès à Kobané contre Da’ech serait un point d’appui pour toute la révolution syrienne, et pour le peuple palestinien.
L’aspiration nationale kurde, la forme et la manière dont elles peuvent se concrétiser, ne peut être instrumentalisée par quiconque, et ne peut se réaliser qu’au travers du combat commun des peuples de la région pour la démocratie, et contre le capitalisme et les États qui le protègent.
Dans leur lutte, les Syriens et les Palestiniens, les Kurdes des différents États, ne peuvent pas compter sur le soutien des grandes puissances ni des États voisins. Par contre, la responsabilité du mouvement ouvrier international, en France notamment, est de soutenir l’ensemble de ce combat.